Ressources pédagogiques de la filière semences
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Les semences potagères et l’environnement

Les sélectionneurs ont pour principal objectif de créer des variétés peu sensibles aux maladies, ce qui permet de réduire l’utilisation de produits phytosanitaires. Par ailleurs, la profession semencière a un rôle fondamental pour la conservation de la biodiversité végétale.

LE DÉVELOPPEMENT DES VARIÉTÉS RÉSISTANTES

Pour les sélectionneurs, la création de variétés résistantes aux ravageurs (champignons, bactéries, insectes) est très souvent une priorité. Cela permet aux producteurs de légumes d’éviter les pertes de rendement et de limiter l’utilisation de produits phytosanitaires pour protéger les cultures.

– De nombreux bio agresseurs
Dans le monde, 10 % à 50 % de pertes en productions légumières sont dues aux attaques de bioagresseurs. De nombreux parasites attaquent une large gamme d’espèces de légumes. Ces parasites sont dits polyphages. Certains champignons sont spécifiques d’une espèce et n’attaquent pas les autres appelées espèces immunes. Parmi les espèces potagères cultivées, certaines sont très attaquées (on connaît aujourd’hui plus de 280 bioagresseurs pour la tomate).

– De nouvelles variétés plus résistantes
Les variétés anciennes de tomate (Rose de Berne, Cornue des Andes…) étaient souvent attaquées par des champignons (oïdium, Fusarium, Verticillium, Cladosporium) qui détruisent les récoltes. Les sélectionneurs ont créé des variétés plus résistantes à ces champignons.
Pour la plupart des espèces potagères, des variétés ont été sélectionnées pour offrir de meilleures résistances. On peut ainsi citer les résistances aux maladies des nouvelles variétés d’aubergine (mosaïque du tabac, virus du concombre, oïdium, Verticillium), de concombre et de cornichon (oïdium, virus du concombre), de haricot (anthracnose, mosaïque commune), de melon (Fusariose, oïdium) ou de laitue (Bremia, mosaïque de la laitue).

– Des centaines de programmes de recherche
La sélection de variétés résistantes s’est développée dès la fin des années 1950. Depuis, des études concernent les relations entre 150 couples plantes/ bioagresseurs. En France, 240 programmes de recherche portent sur des gènes de résistance aux champignons, aux virus et aux bactéries, et aux insectes depuis les années 1990. Les équipes de recherche françaises et européennes ont connu un large succès dans l’introduction de ces résistances.

– Les différents types de résistances génétiques
Les résistances à déterminisme monogénétique
Il s’agit de résistances liées à un seul gène. Elles peuvent durer plusieurs dizaines d’années. C’est le cas de la résistance au Colletotricum sur le haricot et de certaines résistances pour la tomate, le piment, le melon, la laitue, le pois, le concombre. Cependant, la plupart des résistances monogéniques sont contournées.

– Les résistances à déterminisme polygénique
Par manque de résistance monogénétique de haut niveau et stable dans le temps, les recherches ont été orientées vers des résistances intermédiaires, dont l’expression est partielle et quantitative. Ces travaux de sélection ont commencé dès les années 1970 chez les espèces autogames (melon, tomate, piment, concombre…). Ces résistances partielles polygéniques, dites intermédiaires, sont normalement durables et associées à une agriculture à faibles intrants et agroécologique. Les rotations, la vie biologique des sols et de l’environnement et le complexe argilo-humique peuvent éviter la propagation des maladies.

– Les résistances aux insectes
Il n’existe pas de résistances génétiques simples contre les insectes. Cependant, des gènes de résistance à des pucerons ont été sélectionnés chez le melon et la laitue.
Pour lutter contre plusieurs insectes d’espèces légumières, les chercheurs favorisent des mécanismes de lutte diversifiés : structure de la feuille, poils, exsudats…

– Comment introduire des résistances génétiques dans les variétés
Pour introduire des résistances génétiques, il faut d’abord bien connaître le parasite, son mode de reproduction, sa transmission, ses conditions d’infestation et son développement dans la plante. Le sélectionneur doit avoir évalué le degré de résistance ou de sensibilité du matériel végétal dont il dispose. Ce matériel peut comprendre des espèces et variétés cultivées, mais aussi des espèces sauvages apparentées qui peuvent se croiser avec les variétés. En effet, il sera nécessaire d’effectuer des croisements entre la variété sensible et la plante résistante. L’introduction de gènes de résistance provenant d’une espèce sauvage demandera cependant plus de temps.

– La caractérisation des résistances génétiques
Dans le cadre de l’inscription des variétés au Catalogue, le Comité technique Permanent de la Sélection (CTPS) a confié la caractérisation des résistances génétiques des variétés au Groupe d’Etude et de contrôle de Variétés des Semences (GEVES).
Plusieurs milliers de tests officiels permettent d’évaluer la collection de référence et les nouvelles variétés. Ce sont essentiellement des biotests, en espace confiné (serre ou chambres de culture…), sur de jeunes plantes, avec un délai de réponse après inoculation de quelques semaines, les délais de réponse variant d’une espèce à l’autre et d’un bioagresseur à l’autre (c’est très variable d’une espèce à l’autre, pour le basilic on peut avoir des réponses en 1 semaine par exemple).
Ces tests mesurent la résistance de la plante par rapport à des témoins résistants et sensibles. Les protocoles d’évaluation des résistances génétiques doivent être fiables, reproductibles et représentatifs de la résistance en conditions naturelles.
Chaque année, le GEVES caractérise les résistances génétiques de nouvelles variétés à des races ou souches de bio agresseurs : par exemple pour le concombre (7 bioagresseurs), pour l’épinard (3), pour le haricot (5), pour la laitue (20), pour la mâche (2), pour le melon (12), pour le piment et le poivron (10), pour le pois (10), pour la tomate (19)…
La mesure du progrès génétique dans la résistance génétique aux bioagresseurs chez les espèces cultivées fait partie des objectifs pour le développement de l’agroécologie.

DES SEMENCES POUR L’AGRICULTURE BIO

Depuis 1991, suite à un règlement européen, les agriculteurs bio doivent utiliser des semences produites conformément aux règles de l’agriculture biologique. Ils ne peuvent pas employer des produits phytosanitaires pour protéger leurs cultures. Il est donc essentiel qu’ils puissent disposer de semences biologiques parfaitement saines dont la qualité est garantie par une certification officielle. Par ailleurs, les agriculteurs bio recherchent des variétés économes en intrants (eau, engrais), c’est-à-dire des variétés résistantes aux stress et ayant une bonne capacité à utiliser l’azote disponible dans le sol.

Afin de permettre aux agriculteurs bio de trouver les semences et plants dont ils ont besoin, l’interprofession des semences et plants gère une base de données présentant les variétés disponibles pour chaque espèce (www.semences-biologiques.org).

En 2021, la France comptait 135 entreprises de production de semences bio et 274 agriculteurs-multiplicateurs pour 67 espèces cultivées. Près de 18 000 hectares ont été consacrés à la multiplication des semences et plants qui connaît une forte progression chaque année (+ 150 % en 5 ans).

DES VARIÉTÉS ANCIENNES SUR LE MARCHÉ

Pour être commercialisable en France, une variété doit être inscrite au Catalogue des espèces et variétés. Toutefois, l’inscription des variétés génère des coûts de contrôle. Les conditions financières pour accéder au Catalogue peuvent ainsi être un obstacle pour enregistrer des variétés de faible diffusion et qui présentent un intérêt commercial limité. La Section Potagères et Florales de SEMAE a donc décidé en 2013 de prendre à sa charge les frais relatifs à l’inscription des variétés dites « adaptées à des conditions particulières de culture » principalement destinées aux jardiniers amateurs ». Cette mesure a permis de financer l’inscription de plus de 100 variétés principalement de tomate, mais également de chou, concombre, courgette, laitue, melon, navet, piment et radis.

Le Catalogue recense aussi les variétés anciennes patrimoniales menacées d’érosion génétique dites « Variétés de conservation » qui peuvent être cultivées dans leurs pays d’origine. Le ministère de l’Agriculture prend en charge la totalité de leurs frais d’inscription.

Au total, ce sont plus de 350 variétés anciennes ou de niches qui sont ainsi commercialisables sur ces deux listes spécifiques du catalogue officiel, en sachant qu’il existe par ailleurs un grand nombre de variétés anciennes sur les autres listes du catalogue.

Cependant, afin de pouvoir être inscrites sur ces listes, ces variétés anciennes doivent pouvoir être maintenues. Cette maintenance, qui a un prix, est en effet indispensable pour que le maximum de variétés anciennes de légumes soit disponible pour les consommateurs. Fin 2020, un fonds de soutien à la maintenance des variétés du domaine public a été lancé par SEMAE afin d’aider les mainteneurs qui en feraient la demande. Les demandes doivent concerner des variétés anciennes de légumes en voie de radiation du catalogue officiel, ainsi que celles dont le niveau de commercialisation est insuffisant pour couvrir les frais de maintenance et assurer la conservation de toutes les caractéristiques qui y sont attachées. Ces variétés doivent, en outre, avoir une valeur patrimoniale et culturelle dans notre pays et avoir été cultivées historiquement sur le territoire français. Une cinquantaine de variétés sont soutenues par ce fonds à ce jour.

En savoir plus sur l’inscription des variétés de légumes 

La diversité des variétés est demandée par le consommateur. Ici, des carottes de différentes couleurs – © iStock / Robert Sarno

BIODIVERSITÉ ET RESSOURCES GÉNÉTIQUES

Chaque année, des centaines de nouvelles variétés sont inscrites au Catalogue. Parallèlement, d’autres variétés ne sont plus commercialisées et ne sont pas maintenues au Catalogue. Mais elles ne disparaissent pas, bien au contraire, car elles font partie des ressources génétiques. En effet, les sélectionneurs sont très attentifs à ce que les anciennes variétés soient conservées, car elles constituent un réservoir génétique pour la création de nouvelles variétés.

La gestion nationale des réseaux

En raison de l’importance des ressources génétiques, source de biodiversité, les pouvoirs publics ont mis en place en 1995 une gestion nationale de réseaux d’espèces d’intérêt économique. Ces réseaux maintiennent, décrivent et évaluent plus de 15 000 variétés.

Les missions de ces réseaux sont de :

– conserver les graines dans les conditions les mieux adaptées (froid, absence d’humidité…),

– régénérer régulièrement les semences en les cultivant,

– décrire les caractéristiques de chaque variété et vérifier qu’elles soient stables dans le temps.

Les partenaires de ces réseaux sont des organismes institutionnels : INRAE, GEVES, Ecoles d’agronomie, CIRAD, des semenciers et des conservatoires de ressources génétiques.

Les collections

Historiquement, en France, les entreprises de sélection ont été les premières à réaliser la conservation et la maintenance des plantes constituant les ressources génétiques depuis près de 200 ans.

Au niveau national, la recherche publique et les semenciers privés assurent la gestion de 27 collections regroupant près de 37 000 plantes qui représentent la diversité de ces espèces. Au niveau mondial, plus de 4 millions de plantes sont ainsi conservées.

La collection nationale

Depuis 2016, une collection nationale française des ressources génétiques est en cours de constitution. Par ailleurs, la France participe au Traité International sur les Ressources Phytogénétiques pour l’Agriculture et l’Alimentation (TIRPAA) qui permet un accès à plus de 1 500 000 ressources génétiques au niveau mondial.