Ressources pédagogiques de la filière semences
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De nombreux débouchés

Grâce à sa diversité génétique et à celle de ses espèces voisines utilisées en sélection, le colza offre une palette d’utilisations industrielles et agroindustrielles. Les travaux de sélection se sont attachés à adapter le profil de l’huile de colza pour coller à la fabrication d’huiles alimentaires, de lubrifiants, de tensioactifs et de solvants.

L'HUILE ALIMENTAIRE

Bouteilles d'huile alimentaire – © iStock / Sarymsakov

Bouteilles d’huile alimentaire – © iStock / Sarymsakov

La graine de colza contient 44 % de matières grasses. La composition en acides gras de l’huile de colza est intéressante sur le plan nutritionnel :
• peu d’acides gras saturés (palmitique, stéarique) : 6 à 8 % ;
• 58 à 61 % d’acide oléiqueacide gras mono-insaturé ;
• autour de 30 % d’acides gras polyinsaturés dont :
– 21 à 22 % d’acide linoléique, acide gras essentiel précurseur de la famille des oméga 6,
– 9 à 11 % d’acide alpha-linolénique, acide gras essentiel précurseur de la famille des oméga 3.

L’huile de colza apporte donc les deux acides gras essentiels indispensables à la vie, oméga 3 et oméga 6, que le corps humain ne sait pas synthétiser. Il est donc nécessaire de les trouver dans l’alimentation. Les enquêtes révèlent que les Français ne consomment pas assez d’oméga 3.

De plus, environ 60 % des acides gras essentiels (acides alpha-linolénique et linoléique) de l’huile de colza sont situés en position interne des triglycérides et donc biodisponibles, c’est-à-dire directement utilisés par l’organisme après digestion.

Ces oméga 3 et 6, apportés dans des proportions équilibrées, sont reconnus comme ayant des propriétés de prévention vis-à-vis des risques cardio-vasculaires, de prévention de l’obésité et du cancer et comme des éléments constitutifs importants dans l’élaboration et le maintien des cellules nerveuses. Des études insistent tout particulièrement sur l’équilibre des acides gras dans la prévention contre l’obésité et sa transmission transgénérationnelle.

L’huile de colza apporte également des vitamines, notamment de la vitamine E, un antioxydant qui contribue à la protection des cellules contre le stress oxydatif.


L’apport du progrès génétique

Un des axes des travaux de sélection est de valoriser les nombreux atouts nutritionnels de l’huile de colza.
Les sélectionneurs accentuent les qualités nutritives de l’huile en créant des variétés avec des profils d’acides gras très particuliers :
• le colza HO (high oleic) riche en acide oléique  (teneur > 75%), reconnu pour ses effets sur le cholestérol sanguin et la prévention cardio-vasculaire ainsi que pour sa stabilité à haute température.

  • le colza LL (low alpha-linolénique) pauvre en acide linolénique (teneur < 3,5%), bien adapté à la cuisson.
  • le colza Holl (high oleic low linolenic) appelé aussi « triple zéro » (000) est à la fois riche en acide oléique et pauvre en acide linolénique. Les huiles Holl résistantes à des températures élevées sont de bonnes huiles de friture.

Actuellement, les programmes de sélection favorisent la présence d’acides polyinsaturés de la famille des oméga-3 pour leur effet bénéfique sur la santé.

Et pourtant, l’huile de colza n’a pas toujours connu la faveur des consommateurs
Dans les années soixante, une expérience menée sur des rats a révélé que la forte consommation d’acide érucique entraînait chez ces animaux des lésions cardiaques, des retards de croissance et des accumulations anormales de graisse.
Cette étude a fortement discrédité le colza, alors que ces effets n’ont jamais été démontrés chez l’Homme. Les asiatiques consomment des quantités importantes d’huile de colza avec acide érucique.

La filière s’est mobilisée pour sauver la culture du colza en France. En quelques années, les sélectionneurs ont créé des variétés ne contenant plus d’acide érucique. Primor, la première variété 0 sans acide érucique, a été inscrite au Catalogue officiel en 1973. Elle est issue du rétrocroisement entre une lignée de colza fourrager canadien Liho, sans acide érucique, et la variété Major comme parent récurrent. Ce caractère a ensuite été rapidement introduit à l’ensemble des variétés.

 

 

 

LE TOURTEAU DE COLZA

La graine de colza contient 19% de protéines. Une fois l’huile extraite des graines, il reste les écailles de presse qui sont séchées et compactées en granulés. Le tourteau de colza est utilisable dans la plupart des rations animales, en substitution partielle ou totale du tourteau de soja importé (premier tourteau consommé), bien qu’il soit moins riche en protéines et moins énergétique. Sa teneur élevée en cellulose et en lignine réduit la digestibilité des acides aminés, ce qui peut limiter son utilisation, notamment chez les monogastriques.

En France, 2,2 millions de tonnes de tourteaux de colza ont été consommés dans les élevages en 2018/2019, contre 3,4 millions de tonnes de soja.

Traitement technologique

La définition de l’optimum technologique du tourteau est différente selon le type d’animaux.
Pour les ruminants, il est nécessaire de protéger les protéines de la dégradation lors du passage dans le rumen, sans nuire à leur digestibilité intestinale.
A l’inverse, pour les monogastriques, la disponibilité des protéines doit être préservée.

Dans les deux cas, un traitement thermique spécifique améliore la valeur nutritionnelle du tourteau.

 

 

 

 

 

COMPOSITION DU TOURTEAU

Le tourteau de colza est une source de protéines pour les bovins :

Bien équilibré en acides aminés digestibles
La concentration en lysine et méthionine digestibles du tourteau de colza est proche des seuils recommandés pour les vaches laitières. Il permet donc d’atteindre facilement un équilibre en acides aminés dans la ration.

Riche en minéraux
Le tourteau de colza est riche en phosphore et en calcium ce qui permet d’économiser la complémentation en minéraux.

Rôle des acides gras sur la qualité du tourteau
La part élevée d’acides gras insaturés dans la matière grasse du tourteau de colza influence la composition du lait et serait de nature à améliorer les qualités nutritionnelles (en limitant les maladies liées au cholestérol) et technologiques des produits laitiers (en augmentant la tartinabilité des beurres).


Facteurs anti-nutritionnels

Le colza contient des facteurs anti-nutritionnels responsables d’effets indésirables chez les animaux:

  • Les glucosinolates(GLS)
    Les produits de dégradation des glucosinolates engendrent des problèmes d’inappétence et de désordres physiologiques chez les ruminants et les animaux monogastriques. Les progrès génétiques obtenus grâce la sélection ont permis de disposer sur le marché de variétés de colza à faible teneur en glucosinolates.
  • La sinapine
    La sinapine du colza est un composé phénolique dont le métabolisme chez certaines espèces de poules pondeuses produit une odeur de poisson dans les œufs.
  • L’acide phytique
    L’acide phytique constitue une réserve de phosphore dans les graines de colza mais les animaux monogastriques ne sont pas capables de l’utiliser car leur système enzymatique intestinal ne contient pas de phytase (enzyme responsable de la dégradation de l’acide phytique et de la libération du phosphore).

L’apport du progrès génétique

Des tourteaux comme source de protéines

Jusqu’au début des années 90, la présence de glucosinolates (plus de 100 µmoles/g), de substances soufrées goitrogènes et une teneur élevée en cellulose limitaient considérablement l’usage du tourteau de colza.

Des variétés à faible teneur en glucosinolates ont été produites par rétrocroisements et sélection généalogique classique, en utilisant un cultivar polonais « Bronowski » comme géniteur. Les variétés Darmor, à teneur intermédiaire, puis Samourai, à faible teneur, ont été inscrites respectivement en 1983 et 1989.

Toutes les variétés inscrites et commercialisées en France sont à faible teneur en glucosinolates (norme VATE inférieure à 18 µmoles/g). Le travail de sélection du colza a conduit à la création de variétés produisant un tourteau à haute teneur en protéines, équilibré en acides aminés digestibles. Des programmes de sélection en cours visent à transférer au colza le caractère « graine jaune » existant chez des espèces voisines (B. campesiris, B. juncea B. carinata). Ce caractère s’accompagne d’une diminution de la teneur en cellulose, en lignine et en hémicellulose des graines, et d’une augmentation de la teneur en huile et en protéines.

LES BIOCARBURANTS

En 2019, la France a produit 1,6 million de tonnes d’huile brute de colza. Outre la consommation en alimentation humaine, l’huile de colza est utilisée dans de nombreux domaines tels que les biocarburants permettant ainsi d’accompagner la décarbonation des transports, et la chimie verte biosourcée qui se développe comme alternative à la chimie issue du pétrole.

LE BIODIESEL

Energie renouvelable, le biodiesel est un biocarburant biodégradable et non toxique, élaboré à partir d’huiles végétales.
Il est principalement connu sous la marque « Diester » qui est la contraction de diesel et ester. Le biodiesel peut être utilisé pur, sans être mélangé au gazole (B100) mais nécessite l’emploi de joints particuliers pour les moteurs. En pratique, il est mélangé à des taux allant de 5 à 30% (B5, B30) sans besoin de modification des véhicules.

A noter que l’huile végétale brute peut être directement utilisée dans les moteurs diesel sous réserve de modifications de ces derniers afin de réchauffer le carburant.

Depuis la directive européenne sur les biocarburants de 1995, tous les véhicules diesel français roulent avec 7 ou 10% de biocarburant dans leur gazole (B7, B10). Certaines flottes (camions, bus) roulent avec 100% de biodiesel, vendu sous la marque Oléo100.

Le biodiesel est produit à partir d’huiles végétales de colza et tournesol. Il résulte d’une réaction chimique entre un alcool et un ester : la transestérification. La transformation de l’huile végétale par le méthanol aboutit à la production d’ester méthylique d’huile végétale EMHV (biodiesel) et de glycérol. Pour augmenter la vitesse de réaction, il faut chauffer le liquide vers 50°C et ajouter un catalyseur alcalin. Avec une tonne d’huile et 100 kg de méthanol, on obtient une tonne de biodiesel et 100 kg de glycérine.

Le biodiesel a des caractéristiques physico-chimiques très proches de celles du gazole routier alors que les huiles végétales possèdent une viscosité plus importante et un indice de cétane plus faible (capacité à s’enflammer). Le biodiesel pur est plus corrosif que le pétrodiesel pour le caoutchouc, d’où la nécessité de bien vérifier la nature des joints des moteurs.
L’incorporation de biodiesel permet d’améliorer significativement le pouvoir lubrifiant des gazoles et réduit l’usure des moteurs.

La production française de biodiesel se chiffrait en 2018 à 1,7 million de tonnes.


Les intérêts environnementaux du biodiesel

Face aux menaces qui pèsent sur l’environnement, la lutte contre le changement climatique par la diminution des gaz à effet de serre est une priorité pour les États.

Le biodiesel est la seule énergie renouvelable liquide directement substituable au gazole. Il est utilisé à grande échelle pour les moteurs diesel et acheté par les sociétés pétrolières qui l’incorporent au gazole.

Le biodiesel limite les émissions de gaz à effet de serre étant donné que son bilan d’émission de CO2 est souvent plus faible. Consommer un litre de biodiesel, c’est rejeter 2 kg de CO2 en moins comparé à du gazole (- 59% selon l’Ademe). Le biodiesel a un impact positif sur la réduction des émissions de particules et contribue à la qualité de l’air. Il permet par ailleurs aux pays producteurs d’être moins dépendants en énergie et de réduire les importations de gazole.


L’apport du progrès génétique

Les programmes de  sélection variétale visent à obtenir des profils d’acides gras particuliers, rendant l’huile moins sensible à l’oxydation et permettant un meilleur fonctionnement à froid des moteurs diesel.

La production d’huile à l’hectare est un axe prioritaire des sélectionneurs, quelle que soit son utilisation, mais particulièrement pour la production de biocarburant.

LES BIOPRODUITS

Les biolubrifiants

De tout temps, les huiles et les graisses végétales ont servi non seulement à la lubrification, mais aussi à l’éclairage, à la peinture et à bien d’autres usages non alimentaires. Reléguées au second plan à la faveur des dérivés du pétrole, les huiles végétales ont pourtant de sérieux atouts : elles sont biodégradables et renouvelables. De plus, elles offrent une grande diversité moléculaire. Certaines plantes produisent des acides gras difficiles à obtenir avec des produits d’origine pétrolière.

En général, les huiles végétales ne sont pas utilisées en l’état. Elles doivent subir des transformations avant d’entrer dans des applications non alimentaires : esters méthyliques, alcools, acides gras… Les procédés développés pour transformer les huiles végétales doivent être économiquement et techniquement compétitifs. Les bioproduits recherchés doivent présenter des caractéristiques au moins équivalentes en termes de fonctionnalités aux dérivés pétrochimiques et supérieures d’un point de vue environnemental. Un biolubrifiant présente un surcoût de 30 à 40% par rapport à un lubrifiant classique mais il réduit la consommation d’énergie, l’usure du moteur et a une durée de vie supérieure.

Un fort potentiel de développement

De nombreuses études démontrent la meilleure éco-compatibilité des lubrifiants à base d’huiles végétales et de leurs dérivés esters par rapport aux huiles minérales. En effet, elles présentent une meilleure biodégradabilité, une forte innocuité au niveau toxicologique et réduisent les émissions de gaz à effet de serre de 50% (Source Ademe). Ces huiles sont utilisées pour les tronçonneuses, les machines agricoles et engins de chantier, les panneaux pour coffrage béton, les forages pétroliers, les réseaux ferroviaires, les écluses…

 

 

 

 

L’Allemagne et la France sont les principaux producteurs de biolubrifiants. Les huiles riches en acide oléique sont les plus recherchées pour cet usage. Les biolubrifiants évoluent sur un marché prometteur, même s’ils ne représentent à ce jour que 2 à 3 % du marché global des lubrifiants en Europe.


Les tensioactifs

Les tensioactifs sont des molécules à la fois lipophiles et hydrophiles qui, selon leur structure, ont un pouvoir émulsionnant, adoucissant, mouillant ou détergent. Ils entrent dans la composition des produits de l’hygiène, de la cosmétique, de la pharmacie, des détergents et des agents de surface. L’acide érucique, par exemple, est recherché dans la fabrication des lessives et de la cosmétique (savons, crèmes, dentifrice, rouge à lèvres…).

Les tensioactifs d’origine végétale ont un impact favorable sur l’environnement par leur biodégradabilité, leur écotoxicité faible, voire nulle, et par leur innocuité pour la santé humaine.

De l’intérêt grandissant des consommateurs pour les bioproduits, découle une forte progression des tensioactifs d’origine végétale. Sur le marché européen des tensioactifs, 35% sont d’origine végétale.


Les encres et les solvants

Les solvants issus de la pétrochimie émettent des composés organiques volatils (COV) qui présentent des risques pour la santé humaine et sur l’environnement. A l’inverse, les solvants d’origine naturels, non volatils, offrent des garanties de sécurité et de biodégradabilité.

Les solvants trouvent des applications dans les domaines des peintures et vernis, des encres, des  adjuvants et dégraissants. Les esters méthyliques d’huiles végétales (EMHV), issus de l’huile de colza, possèdent un très fort pouvoir solvant. Ils sont utilisés comme adjuvants de produits phytosanitaires en agriculture, dégraissants industriels, décapants, encres d’imprimerie…

Les imprimeries utilisent de plus en plus d’encres à base d’esters d’huiles végétales. Moins polluantes, plus écologiques, ces encres offrent des couleurs plus vives et des journaux moins salissants grâce à une meilleure résistance aux frottements.